Existereo

Il est devenu l'un des plus éminents membres du crew Shapeshifters. Il est l'alter ego de Met Fly au sein des Overfiendz et le leader du duo Whyknows. Il porte le même prénom que l'ex-femme de Kurt Cobain. Une large partie de l'auditoire underground a plébiscité son "Dirty Deeds & Dead Flowers", certainement l'une des sorties les plus retentissantes de 2003. Les backpackers les plus vernis ont pu apprécier son potentiel scénique sur les planches du Nouveau Casino il y a quelques semaines. "Crush Groove", son nouveau bébé, est plus ou moins disponible depuis quelques jours. Entre deux concerts et un rendez-vous chez le tatoueur, Existereo a répondu aux questions d'Hip-Hop Core. Entretien avec un punk. English version



Hip-Hop Core: Alors, après tes passages en France, que penses-tu du public français ? Ca t'a plu ?



Existereo: Ouais, c'était incroyable. Après mon concert solo, je suis revenu en France avec les Shapeshifters cette année. Les quatre shows que j'ai fait en France étaient super. J'en ai fait 2 à Paris, un à Rennes et un à Roubaix. Le public était vraiment incroyable dans tous ces endroits. On va tous déménager là-bas un jour ! Avec un peu de chance, cet été, je vais pouvoir rester un mois à Paris comme ma copine y fait ses études. Je vais peut-être pouvoir travailler sur cet album avec TTC si tout se passe bien.



HHC: J'ai cru comprendre que c'est plus ou moins en traînant autour de Darkleaf que tu as voulu te mettre au rap. Suis-je dans le vrai ? Comment tout ça s'est concrètement déroulé ?



E: Ouais, Darkleaf est clairement le groupe qui m'a fait sortir de ma coquille et m'a mis le pied à l'étrier. Ils m'ont aidé en quelque sorte à devenir ce que je voulais être (et qu'ils savaient que je voulais être). Parfois, tu as juste besoin d'un coup de main de ce type pour te révéler. Je leur en serai toujours redevable. Je sais pertinemment que je ne ferai pas ce que je fais aujourd'hui s'ils n'avaient pas été là.



HHC: Ton album "Dirty Deeds and Dead Flowers" a été l'une des sorties underground les plus retentissantes de l'année 2003. Parle-nous un peu de ce disque. Comment et en combien de temps l'as-tu construit ?



E: Il m'a pris plus longtemps à réaliser que ce que je pensais au départ, environ un an. Mais certains des lyrics sont des textes que je bossais même déjà quand j'étais au Portugal. Je pense que d'une certaine façon c'est un album qui s'est élaboré tout au long de ma vie. Je voulais faire un album qui soit une photographie assez juste des personnes avec qui j'ai pu travailler ces 8 dernières années et de ce que j'ai fait dans ma vie pendant cette période. Parce qu'il y a tellement de projets auxquels j'ai participé qui ne sont jamais sortis que je me devais de laisser une trace sur disque des groupes avec qui j'ai bossé au fil des années. D'autre part, j'ai sorti cet album pour me présenter enfin en tant que emcee solo. J'avais toujours été dans des groupes avant, jamais seul.



HHC: Qu'est-ce qui a motivé le choix des guests et des producteurs ?



E: C'est simple. Pour cet album, c'était tous les gens qui étaient dans mon répertoire, tous mes amis. Là, je viens juste de faire "Crush Groove" qui est en quelque sorte une suite à mon premier album mais qui n'est pas aussi personnel ou sentimental et qui a plus été fait pour les concerts et pour prendre du bon temps. Ca m'a permis de travailler avec certains producteurs avec qui je n'avais jamais bossé auparavant. Ca rend plutôt bien au final. Mais pour le prochain album, qui n'a pas encore de titre, je vais prendre des beats de tous les gens que je veux… des gens que je ne connaissais pas à l'époque du premier album mais que je connais désormais. Grâce à mes nombreuses tournées, j'ai pu rencontrer plein de producteurs dont je n'aurai jamais entendu parler autrement et que j'ai trouvé super bons… Donc j'espère bien que le prochain album sera le bon.



HHC: Es-tu en mesure d'expliquer pourquoi 'Four Way Window Pain' est un des morceaux les plus efficaces de ces dernières années ? Comment a été construit ce track ? Daddy Kev est-il seul à l'origine de ces multiples mouvements ou est-ce que tu y as mis ton grain de sel ?



E: Au départ, on avait commencé à bosser sur deux chansons différentes et on a décidé de les fusionner. C'était vraiment l'idée de Daddy Kev. A chaque fois que je revenais au studio, la chanson était différente et du coup je rajoutais quelques rimes par-ci par-là. Je crois que c'est la raison pour laquelle les différents mouvements de 'Four Way Window Pain' sont si variés. Et puis, Daddy Kev est vraiment un super producteur. Avec lui, c'est impossible de se planter.



HHC: Au bout du compte, l'album est très éclectique. Un titre jazz par-ci, une plage plus expérimentale par-là, un passage un peu plus classique orienté freestyle ailleurs… En quelque sorte, l'album sonne comme un patchwork de tout ce qui te définit, non ?



E: Oui, tout à fait. Chaque jour, je suis d'humeur différente et du coup l'ambiance du titre va dépendre de mon humeur du moment et du beat sur lequel je travaille. Chaque instru a sa vie propre et, si tu peux la trouver, ça te révèle quelque chose… Si tu y arrives, tu fais vraiment de la musique et pas seulement du rap.



HHC: Sur "Dirty Deeds and Dead Flowers", l'intro et l'outro reprennent des passages du 'Live And Let Die' des Wings et d'AC/DC. De plus, le visuel rappelle un peu celui d'un album des Guns 'N Roses… Ces références correspondent-elles à un véritable background ou est-ce qu'on doit considérer ces renvois comme un simple délire de ta part ?



E: C'est la musique sur laquelle j'ai grandi. Je l'écoute toujours d'ailleurs. La pochette de l'album a été faite par un ami et à mon sens elle me fait plus penser au style de tatouage américain flash, qui est quelque chose qui me branche vraiment comme tu le sais. Avec un peu de chance, dans un futur pas trop lointain, je vais essayer de bosser sur un album de punk rock et, si je savais chanter, je ferais un album de country. Mais de toute façon tous les disques que je sors sont des reflets de ma personnalité.



HHC: L'album montre que tu es plus adepte du storytelling que la majorité de tes collègues Shifters. D'où ça te vient ?



E: En fait, la moitié du temps, je ne réalise même pas que je raconte des histoires. Je fais juste de l'association libre et je laisse libre cours à mes pensées. Je ne commence jamais avec un thème donné; les choses prennent forme d'elles-mêmes. Je pense que mes textes sont ouverts aux interprétations. Tu peux imaginer plusieurs histoires différentes et trouver plusieurs sens différents à mes textes. Ca dépend juste de ton point de vue du jour.



HHC: Ces derniers temps ont été chargés pour le crew dont tu fais partie. Où en sont les Shapeshifters ces temps-ci, Circus nous parlait il y a quelque temps d'un album commun qui porterait le nom de "The Shapeshifters Were Here"… ça doit sortir un jour ?



E: Oui. Ce sera composé uniquement de nouveaux titres et, en ce moment, on est train de mettre tout à plat du fait de possibles contrats avec des labels. On va sortir un album en indépendant, un avec un label et un nouveau "Soul Lows". On est aussi en train de re-presser tous nos vieux albums de manière indépendante. Le but pour cette année, c'est de re-presser autant de disques que possible et de faire autant de nouveaux trucs que possible. Mais le nouvel album "The Shapeshifters Were Here" et "Soul Lows 2" sont vraiment forts de mon point de vue. Je suis très content de ce que le groupe est en train de faire.



HHC: Alors, Overfiendz… split ou pas split ?



E: Metfly s'occupe de son truc. Moi, je suis occupé par mes affaires. Un jour, on refera un EP ensemble mais pour le moment il y a tellement d'autres choses sur lesquelles on doit se concentrer que c'est vraiment dur de dire quand ça se fera.



HHC: Outre ton premier LP solo, tu as également sorti cette année un nouveau projet de Whyknows intitulé "Vinho Barato". Tu peux nous en parler ?



E: C'était juste un dope album. Mes frères et moi avons pu passer un peu de temps ensemble quand on était au Portugal. On travaillait tout le temps sur de la musique ensemble donc on a décidé de faire un album. Il devrait y en avoir un nouveau avant 2005 d'ailleurs mais Innaspace est très occupé par l'école (et c'est une école de musique) donc j'essaie de ne pas le distraire. Il sortira aussi un nouvel album solo. D'ailleurs, si vous ne connaissez pas son dernier solo "The New Colour", partez à sa recherche.



HHC: J'ai lu quelque part que tu te définissais comme un "music nerd". Qu'est ce qui t'a marqué ces derniers temps d'un point de vue musical ?



E: TV on the Radio, The Darkness, Subhumans… Je me fais des mix-CD's toute la journée qui vont de Hank Williams III (Hank III) à Edith Piaf en passant par Pigeon John, Frank Zappa, etc…



HHC: Le livret de "Dirty Deeds & Dead Flowers" est truffé d'illustrations, de peintures et de photos. Outre ta complicité avec Mear et ton appartenance "ancestrale" au CBS crew, qu'est-ce qui te lie aujourd'hui encore au Graffiti ?



E: Et bien, par exemple, on a fait une fresque à Paris ! J'ai toujours un marqueur sur moi. Je ferai toujours des tags. Je ne ferai plus autant de fresques mais c'est uniquement parce que, pour le faire, il faut vraiment s'y investir à fond. Maintenant, je consacre tout mon temps à ma musique. Mais il n'y a pas que Mear et le CBS crew; environ 80% de mes amis sont des graffers. Quand tu fais du graff comme le CBS le fait, ça ne te quitte pas. C'est dans mon sang.



HHC: A ce sujet, quel est l'aspect du graffiti qui t'a attiré au départ ?



E: Juste le fait de peindre avec une bombe. J'adore ça. J'aime bien me lever, aller me promener et laisser une trace de mon passage… avec goût (quoique sur ce dernier point les opinions divergent). Mais, quand tu vois un beau tag ou un graff bien réalisé, tu peux dire que c'est quelqu'un de "pro" qui l'a fait… et non pas un gamin avec un marqueur pourri.



HHC: D'ailleurs, tu as participé au projet "Ex Vandalz" en soutien au graffiti. Peux-tu nous parler un peu de ce disque et de sa fameuse édition picture disc ?



E: C'est le projet de Perk, un des membres originels des Shifters, donc je suis toujours prêt à lui rendre service dès qu'il a besoin de moi. L'édition picture disc est incroyable. Je suis content que quelqu'un d'autre monte d'un cran la qualité de nos produits en indépendant. Il devrait y avoir un nouveau 10" picture disc porteur du sceau Ex-Vandalz et intitulé 'Gunstar Heroes' avec moi et une poignée d'autres gars. Ex-Vandalz, c'est le lieu qui me permet vraiment de représenter CBS au maximum et c'est ma première famille.



HHC: En concert, les gens remarquent immanquablement les nombreux tatouages qui couvrent une bonne partie de ton corps. D'où te vient ce goût pour les tatouages ?



E: Ca s'est fait naturellement. Avant je possédais un magasin de piercing sur Melrose à Hollywood et j'avais beaucoup d'amis qui étaient des tatoueurs doués. Certains mecs de CBS comme Duel et Skate tatouaient des gens par exemple. J'ai juste eu de la veine. J'aimais les couleurs et le symbolisme des tatouages alors je me suis dit: "je suis déjà un exclu alors, tant qu'à faire, autant le rendre officiel". A ce propos, ça m'étonne toujours de voir à quel point les tatouages sont bien plus acceptables maintenant qu'il y a à peine dix ans.



HHC: Tu ne pouvais pas y échapper. Parle-nous du projet Ghostwriters (avec Awol One et Die) ?



E: Ce projet va nous tuer. C'est comme dans le film "Poltergeist"; il va arriver des choses horribles à tous les gens qui aident à la réalisation de cet album. Mais on le fait quand même. On vient juste d'arrêter d'enregistrer sur les anciens sites de sépulture indiens… Pour être plus sérieux, on ne veut pas trop précipiter les choses. On prend notre temps mais, quand ce sera finalement terminé, le résultat justifiera l'attente.



HHC: Qu'en est-il de tes projets et de ceux de tes compères Shape Shifters ?



E: Dans l'ordre, cette année, on devrait sortir:
1. Existereo "Crush Groove" (ndlr: l'album vient de sortir)
2. "Shapeshifters Were Here"
3. "Soul Lows 2"
4. Die & Deeskee "Ravish"
5. Perk "Graffiti Brydge"
6. Chainsmokers et tout ce qu'on aura pu enregistrer d'ici la fin de l'été
…et, à part ça, Xololanxinxo et moi travaillons sur un projet secret.



HHC: Un petit message pour les lecteurs de www.hiphopcore.net?



E: On apprécie vraiment la France et tout l'amour que vous montrez pour les Shifters et les membres de la grande famille La2theBay. Sinon, désolé d'avoir pris presque six mois pour répondre à l'interview. "Est-ce que vous fumez de l'herbe, Faulker?"



Propos recueillis par Kreme
et traduits par Cobalt
Questions de Kreme et Cobalt
Mai 2004

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