Après la collaboration (presque) ratée avec Longevity ("Sweat Lodge Infinite"), le très productif 2Mex revient, en ce premier trimestre 2004, avec un nouvel album des Visionaries ("Pangaea") et un opus solo éponyme de près de 50 minutes, décliné en 12 plages. Epaulé, cette fois-ci, par Omid – heureux instigateur des imparables "Beneath The Surface" et "Monolith" – et, Liferexall – qui vient de se voir décerner le titre de shapeshifter le plus fécond de 2003 -, le rappeur d'OMD se devait, avec cette nouvelle livraison, de reconquérir un public relativement déçu par un "Sweat Lodge Infinite" bancal et inégal.
A l'annonce du casting (Omid et Liferexall sont certainement deux des concepteurs les plus intéressants du paysage westcoast, et les guests Awol, Xolo, Subtitle, Existereo et autres Chainsmokers sont rarement décevants), nous étions en droit d'espérer retrouver l'infatigable 2Mex sur des productions à la hauteur de son potentiel. Auteur de 5 beats, le chainsmoker Liferexall (qui s'apprête à éditer un "Smoke Signals" au tracklist alléchant), semble être, des deux beatmakers invités, celui qui a le plus réussi à mettre en valeur la personnalité et les capacités d'Alejandro. Preuve en est l'habile utilisation des cordes sur la love song 'Baby Ain't Joking' avec Awolrus, ou – plus encore - la composition de 'Dreaming Under Pressure' avec son sample très "Shadow" et ses cuts judicieux, sur laquelle 2Mex fournit certainement deux de ses meilleurs couplets. Au rayon des réussites également, les retrouvailles des deux immigrés d'Of Mexican Descent sur le familial 'Grandmother Moon'.
L'iranian descent Omid n'est pas en reste. Hormis quelques ratés, parmi lesquels l'électrique 'Alive A Cation' (qui ressemble trop au travail de Longevity sur l'opus précédent pour me convenir) ou le maxi 'The Return Of FernandoMania' (qui souffre peu ou prou du même défaut de mimétisme, malgré un couplet monumental de 2Mex)… Hormis quelques déconvenues disais-je donc avant de m'enliser dans les parenthèses… OD sert quelques compositions remarquables. Armé des samples "persans" et des ambiances orientales auxquels il fait régulièrement confiance ('Ghost Memo') ou bien "coiffé" de boucles ravissantes qui collent très bien au teint du mc ('Only As Good As Goodbye'), Omid remplit son contrat sans pour autant égaler la qualité souvent affichée sur ses travaux solos.
Sur le possecut final, néanmoins, Omid (accompagné à la production par un Subtitle dont on commence à se demander s'il n'a pas un réel don d'ubiquité) s'essaie a un exercice de style émérite en offrant une succession de beats torturés, sombres et ingénieux (tout à fait dans la veine des travaux de l'auteur de "I'm Always Recovering From Tomorrow") pour ce "remix allongé" de 'Falcon Gentle' ou brillent le tatoué Courtney Gibson (alias Existereo) et le géniteur de "Dead Air EP", Die Young. On a déjà dit beaucoup de bien (dans ces pages, notamment) à propos du talent de 2Mex ; cet énième réalisation solo ne viendra pas altérer notre jugement quant aux prédispositions du visionary dont les accélérations (particulièrement sur 'The Return of Fernandomania'), le phrasé et la dextérité ornent chacune des plages de ce "2Mex".
Toutefois, 2Mex nous apparaît de plus en plus comme un artiste "frustrant" dont on est persuadé des potentialités mais qui ne semble pas réussir, toujours, à trouver des compositions en parfaite adéquation avec ses qualités de emcee. Qu'à cela ne tienne. Toujours dans le haut du panier, 2Mex nous ravit à chaque intervention et suffit souvent à éffacer ces (relatifs) problèmes de complémentarité.
Kreme Mars 2004