Sacrée année pour Eastern Conference! Entre les sorties du DVD "Eastern Conference", du EP "Air Force 1" de The High & Mighty et des premiers albums de Copywrite, Cage et Nighthawks, autant dire que le label a inondé les bacs ces derniers mois en faisant parler de lui et en s'imposant comme un gage de qualité pour tous les albums portant sa griffe. C'est donc tout naturellement qu'EC a décidé de sortir le troisième volume de sa réputée série "All Stars" pour fêter cette année faste et annoncer la sortie prochaine des LPs de Tame One et des Weathermen. La sélection de cette année est prestigieuse et presque chaque artiste a eu le droit a deux titres. Alors autant faire une petite revue de l'état de forme de chacun :

Toujours aussi irrespectueux et arrogant, Copywrite continue sur la lancée de "The High Exaulted" et enchaîne les punchlines sans temps mort ni pitié sur ses tracks en crachant son venin sur les critiques dans la filée. Si 'Jeah' est une authentique réussite grâce à un Mighty Mi pour une fois au sommet, 'Won't Stop' est décevant du fait d'une production synthétique ratée de RJD2. Misant tout sur son flow d'aliéné, Copywrite déchire toujours le micro mais apparaît une fois de plus fortement dépendant de la qualité de ses instrus... et le restera tant qu'il ne s'aventurera pas vers plus de diversité lyricale.

L'ex-Artifacts Tame One confirme, avec un flow quelque peu mis à jour, qu'il s'en sort très bien sans El Da Sensei. Son alliance avec le génial J-Zone (auteur d'une production dynamique et recherchée qui porte indéniablement sa marque de fabrique) sur 'Tame As It Ever Was' est un succès qui permet à Tame de se présenter à une génération qui ne connaît pas forcément sa gloire passée. Plus classique, le funky 'Dreamz' voit Tame mettre ses rêves de grandeur en paroles et maintient le niveau bien au-dessus de la moyenne.

Pour leur part, The High & Mighty se montrent trop gourmands en s'accaparant 4 titres... qui sentent un peu le réchauffé. D'accord, l'hymne au basket-ball 'And 1' n'est pas mal et il y a le très bon 'Rumble' dû à Domingo (mais il était déjà disponible sur "The Difference Vol. 1"). En dehors de ça, Mr Eon et Mighty Mi nous refourguent un 'Not All There' indigeste (leur pire titre?) et la version originale inutile d'un 'The Last Hit' qui a déjà 5 ans. Pour les Smut Peddlers, ils nous ressortent même, sans qu'on y voit un intérêt quelconque vu sa qualité douteuse, l'original de 'Talk Like Sex Pt. II'. En ce moment c'est les soldes pour le duo en panne d'inspiration semble-t-il.

Le vétéran R.A. The Rugged Man semble enfin avoir trouvé une maison chez E.C. après 10 ans de galères et continue de nous servir ses élucubrations pas très nettes de son flow spécial. C'est tant mieux pour lui et on attend avec impatience son premier LP officiel pour 2003... Mais sur 'Brawl' son phrasé lent se marie mal avec le style sonore sautillant de J-Zone et 'Crustified Dibbs' nous déçoit quelque peu.

Si la géométrie des Weathermen semble varier avec le vent, une constante apparaît : la qualité. Et l'album du collectif s'annonce de plus en plus comme un des événements de l'an prochain. De la succession incessante de rimes du très soul '5 In The Clip' au provocateur 'Gut You', le crew démontre toute sa maîtrise microphonique et on est comblé par une telle avalanche de flows affamés.

Au milieu de tout ça, Cage ressort comme le grand vainqueur de cette rencontre. Que ce soit avec les Weathermen, avec Camu Tao pour le meilleur extrait de "Nighthawks" ou avec Eon pour un 'Bart Burnt vs. Sherm Penn' trippant, ses collaborations frappent toute avec précision. Mais ce sont surtout ses 2 titres solo qui font la différence. Sur un très bon cru de Milo, 'Special Ladies' est un récit immoral mais hilarant d'un Cage obsédé sexuel qui abuse tout ce qui lui passe sous le nez (aveugles, grosses..). Les fans apprécieront. Mais c'est surtout 'Ballad Of Worms' qui mérite les applaudissements et constitue peut-être le meilleur titre de Cage depuis 'Agent Orange'... rien de moins. Sur un instrumental aux saveurs rock et au violon mélancolique concocté par Camu Tao, Cage met en place une ballade nécrophile morbide qui fait subtilement le récit d'un amoureux transi qui tente vainement de ressusciter sa défunte bien-aimée dont le corps se décompose peu à peu. Un récit détraqué mais étonnamment émotionnel et superbement bien écrit. Du grand Cage.

Comme prévu, "Eastern Conference All Stars 3" est fidèle à la tradition du label : des beats lourds qui font rarement dans la dentelle, des lyrics bourrés de punchlines, des flows irréprochables, des bons titres à la pelle, quelques ratés mais aussi quelques perles sublimes... Les adeptes seront servis comme il se doit. Rien de bien nouveau sous le soleil mais on y reste volontiers pour prendre quelques couleurs.

Cobalt
Décembre 2002