Prefuse 73

Tantôt surprenants, tantôt décevants, mais toujours intéressants, les différents projets livrés par Guillermo Scott Herren sous ses diverses identités durant cette dernière décennie l'auront placé en bonne position dans le cœur des aficionados d'expérimentations electro/hiphop ou folk/rock. Son dernier album en date "Preparations" sorti courant 2007 nous a prouvé qu'il en avait encore sous la pédale, et à défaut de révolutionner une recette désormais bien connue, il aura plutôt bien réussi à cristalliser le temps d'un album toutes les influences qui l'ont nourries jusqu'ici, faisant de cet album un des projets les plus représentatifs de sa musique. De passage dans nos vertes contrées, Hip-Hop Core a voulu rencontrer ce personnage mystérieux, souvent dissimulé derrière une paire de lunettes teintées et un couvre-chef toujours vissé sur le crâne, notre photographe était d'ailleurs prié de laisser son attirail au placard le temps de l'interview. Rencontre avec un monument de la musique expérimentale. English version



HHC: Peux-tu rapidement résumer l'idée principale de "Preparations"?



Prefuse 73: L'idée principale? Si on en croit tout ceux qui ont récemment écouté l'album, le disque est moins centré sur la structure des morceaux que les précédents LP's alors qu'en fait j'étais plus concentré sur la structure que sur le reste. Au départ, je n'avais aucune idée que j'allais produire un double CD ou quoi que ce soit d'autre à ce moment là. Je partais sur une idée simple : faire un beat et prendre plus de temps pour le restructurer, pour agir sur les fondements de l'ensemble, pour travailler en sens inverse si tu vois ce que je veux dire?



HHC: Pour des sons plus basiques?



P: Ouais, tout à fait. J'ai essayé d'oublier toutes les ficelles que je connaissais. Je pense que c'est un concept intéressant que d'essayer de recréer ce que tu samples ou les sources d'où tes samples sont tirés. Ca n'est écrit nulle part sur papier parce que je crois que ça n'est pas important pour les gens censés vendre l'album, mais mon but était de recréer ces choses que j'avais choisi de sampler, de réfléchir à l'envers.



HHC: Une fois encore, l'artwork joue un rôle important dans ton développement artistique. En parlant d'artworks, je me demandais qui était le mec sur le vélo sur la pochette de "Vocal Studies + Uprock Narratives"? Quel est le lien entre les différentes couvertures de tes disques et ta musique?



P: J'ai contacté Kemt pour le réaliser, je connais son travail et je sais qu'il est plus habitué à faire dans le minimal mais il est familier de ce que je fais et réciproquement. Il comprenait ce que j'essayais de lui faire faire et je l'ai poussé à aller dans cette direction en lui disant que je pensais qu'il pourrait faire les choses différemment avec moi, comme réaliser des choses minimalistes basées sur des transferts d'impression écran ou des trucs réalisés à la main. C'est de cette manière qu'il a travaillé pour l'artwork et c'est pour ça que je l'avais choisi. Concernant l'artwork de mon premier album, le mec qui avait bossé dessus s'appelle Georgos Strade, sa femme vient du Nigéria et il avait pris tout un tas de photos lors d'un voyage là-bas. Le mec sur le vélo? Juste un gars qui traînait avec lui à cette époque.



HHC: La seconde version du clip de 'The Class of 73 Bells' contient beaucoup de références à d'anciennes traditions très peu connues des auditeurs français et européens. Peux-tu résumer rapidement l'idée qui se cache derrière ce clip? Est-ce important de n'apparaître dans aucune vidéo? Est-ce un choix conscient?



P: Nous avions fait une première vidéo mais elle était pourrie. C'était vraiment de la merde, mec. Nous avions un gros budget. Claudia et Alejandra Deheza (d'anciens membres de on!air!library qui font désormais partie du projet The School Of Seven Bells) étaient impliquées là-dedans et le résultat était une sorte de "Blair Witch Project" mais raté parce que les références étaient trop grillées et dépassées. C'était une idée du réalisateur. A la base, Claudia et Alejandra étaient embarrassées d'avoir à réaliser ça. Elles ne m'ont rien dit jusqu'à ce que je dise : i]"Je l'ai vu aujourd'hui... Je suis vraiment désolé." Et elles: "Ok, c'était l'enfer mais nous sommes aussi désolées, nous pensions que ce serait bien." Le connard qui a mis ça sur Youtube, je ne sais même pas qui c'est parce qu'il va être poursuivi en justice. Mais je veux toujours lui parler... Déjà, je n'apprécie pas qu'un truc soit balancé sur Internet ou Youtube parce que tu es énervé que quelqu'un ait fait un meilleur travail que toi. La dernière version du clip (la version animée) recrée réellement l'ambiance de l'artwork et de l'album. Le réalisateur qui s'en est chargé a fait de son mieux en très peu de temps.

Toute cette affaire est une histoire de déception. Le mec qui a fait la vidéo de Battles 'Atlas' était censé faire le clip mais ses gars étaient pris donc on a dû choisir quelqu'un d'autre à l'arrache. 3 réalisateurs ont fait une vidéo et on a choisi la version animée qui défonce, mais le gars qui a mis l'autre vidéo sur Youtube, je ne sais même pas qui c'est mais je veux lui parler. Je me suis retrouvé dans une situation bizarre à cause de lui. La fille de Workfilms était là à me dire : "Qu'est ce que vous croyez? Ce n'est pas juste un titre de Prefuse, c'est une vraie collaboration, et vous transgressez toutes lois concernant les droits de reproduction et de diffusion". Le mec aurait pu agir autrement pour exprimer son mécontentement, me crier dessus, m'appeler, venir chez moi vu qu'il habite à New York, juste m'en parler.



HHC: Pourquoi as-tu décidé de sortir ton album bien plus tard aux Etats-Unis? Un choix imposé par Warp?



P: Je n'ai rien à voir avec ça. Ca ne m'intéresse pas. Je ne m'implique pas dans ce genre de choses. J'ai juste collaboré avec la presse et c'est tout.



HHC: The School Of Seven Bells est à présent un groupe composé des membres de on!air!library. J'ai cet étrange sentiment d'entendre à nouveau des sons comme ceux de Modulo1000...



P: Modulo1000? Ca me semble assez juste, mec! Ils ne savent probablement pas qui c'est mais moi oui. Mec, c'est bon ça! Très bonnes références! Sérieusement, je suis impressionné. Je croyais avoir été le seul à acheter ce CD ou à en parler autour de moi. C'est intéressant que tu y ais vu une sorte de parallèle avec School Of Seven Bells. Je leur ferai part de ta remarque.



HHC: Comment pourrais-tu définir le concept de "cut up"? Comment t'es-tu approprié cette idée pour enregistrer un album comme "Vocal Studies + Uprock Narratives" en utilisant des samples de voix et en produisant les rythmiques? Une façon d'affirmer ta subversion ou de dépasser tes domaines de création?



P: Ca n'était pas une de mes créations. Juste une inspiration, un condensé de ce que j'écoutais, de manière très large... Comment pourrais-je résumer ça? Communiquer quelque chose mais je ne voulais pas que ce soit trop évident. C'était aussi un exercice de style, tu vois? Si tu prends le premier album, il n'y a aucune limite, tout est mélangé sans vraiment de structure comparé à maintenant. J'étais inspiré par Mantronix et la façon dont DJ Premier découpait les samples et "cuttait" de manière générale, avec quelques cuts assez simples, le tout combiné à ma façon de travailler. Je voulais voir si j'étais capable de revenir sur mes propres morceaux et d'être toujours enthousiaste à leur écoute. Je voulais comprendre ce que j'avais fait. C'est presque comme dessiner les choses dans son esprit, les agencer et créer les choses à sa manière.



HHC: Quel matèriel utilises-tu?



P: A l'époque je n'avais qu'une MPC 2000 et un ordinateur pour enregistrer. Maintenant, j'utilise tous les types de MPC... ou pas loin. Je crois que ça me va bien.



HHC: As-tu entendu ce qui est arrivé à Radiohead récemment? Ils ont vendu plus d'un million d'exemplaires en deux jours et les charts britanniques ont refusé d'enregistrer ça en prétextant que vendre sur Internet n'était pas pris en compte.



P: Ils n'ont plus de label? (ndlr: à l'époque, Radiohead n'avait pas encore signé leur deal actuel avec XL Recordings) Quelle connerie! C'est dingue! C'est vraiment débile. Les charts anglais... Je ne sais pas pourquoi ils ont balancé ça... C'est dingue. Mettre sa musique sur le net, si le groupe est ok avec ça... C'était leur décision de faire ça comme ça. C'est incroyable la manière dont ils l'ont fait, surtout s'ils n'ont plus de label désormais... Du genre "Nous allons continuer à sortir de la bonne musique, les mêmes bons morceaux habituels". J'ai entendu quelques nouveaux trucs à Rough Trade l'autre jour. C'était fantastique. La première fois que je l'ai écouté, je me suis dis "Qu'est ce que c'est que ça?". Et là j'ai entendu le chant et je me suis dis "Merde, c'est le nouveau Radiohead." Ca n'avait pas été marketé, les gens en parlent maintenant, ça signifie quelque chose. C'est disponible, tu peux l'acheter, c'est facile pour les gens de l'obtenir, il y a un message avec ça. Ok, c'est Radiohead mais quand même... J'ai un profond respect pour ça.





HHC: Qu'est-ce que tu écoutes en ce moment? Quel genre de musique t'intéresse?



P: Hé bien... Pour résumer, actuellement je suis entouré par des amis faisant de la musique tous les jours. Donc c'est surtout ça que j'écoute. L'album de Jose Gonzales aussi, de même que le dernier Voice Of The Seven Woods... Ah et aussi le nouveau Kanye West. Je l'ai reçu il y a deux mois et je continue de l'écouter.



HHC: Qui est ce gars sur une vidéo de ta page Myspace qui se moque d'un morceau de Kanye West (cf. 'Can't Tell Me Nothing')?



P: C'est Will Oldham! (a.k.a. Bonnie Prince Billy) C'est pour ça que c'est un concept génial. Kanye était avec ce comédien, Zack Galifianakis et Bonnie Prince Billy, il a co-produit la vidéo et s'est déplacé dans leur ferme. Ca n'est pas une blague, c'est un truc sérieux. Il y a trois versions différentes mais c'est pour moi le truc le plus génial que j'ai vu! Ca n'a aucun sens! J'ai aussi vu ça comme une évolution, maintenant les gens sont assez malins pour réfléchir un peu plus avec moins d'argent afin d'être créatifs. Faire correspondre les images avec le morceau. C'est impressionnant.



HHC: Nous connaissons tous tes différentes identités musicales, laquelle te corresponds le mieux?



P: J'essaie de traiter chaque projet de la même façon, peu importe ce que c'est, j'essaie de m'impliquer dedans avec la même intensité. Si c'est un concept, ok. Je ne travaille pas à moitié sur une musique. Donc toutes mes identités me représentent de la même façon.



HHC: Tu es très proche de Nobody. Vous avec monté un groupe, La Correcion, vous tournez beaucoup ensemble et tu lui as dédicacé un des morceaux sur l'album "Security Screenings". Quand a débuté votre amitié? Comment vous êtes-vous rencontrés?



P: On s'est rencontré à l'époque où nous travaillions tous les deux dans des studios, à produire d'autre groupes, à faire l'ingé son ou quoi que ce soit d'autre. Nous avions des goûts similaires et nous avions sorti des albums à la même période. Je connaissais ce qu'il faisait et réciproquement. Je ne me souviens pas vraiment comment nous nous sommes rencontrés, probablement durant les années 90, juste après la sortie de "Soulmates". En tout cas, juste après notre rencontre, nous avons discuté des heures au téléphone, pour parler de tout et de rien. C'est vraiment un très bon ami. Nous avons beaucoup tourné ensemble, c'est un producteur et un musicien très talentueux, une personne géniale.



HHC: Est-ce qu'un album de La Correcion est en préparation?



P: C'est davantage une somme de trucs jamais terminés. Il vit à L.A., je vis à New York. Il a son groupe Blank Blue maintenant (avec Nikkiradda) et ça lui prend beaucoup de temps. La dernière chose dont nous avons parlé, je parle de faire quelque chose en commun....hé bien je ne m'en souviens même pas, tu devrais lui demander! Il est gentil!



HHC: Tu as vécu pendant deux ans à Barcelone puis tu es rentré sur New-York. Quels sont les différents aspects de ta vie européenne qui te manquent le plus? Quels sont ceux que tu es ravi de retrouver aux Etats-Unis?



P: Hé bien, aux USA, c'est baisé, du point de vue culturel. C'est assez déprimant actuellement. Ca n'est un mystère pour personne : nous avons le pire gouvernement sur Terre, et je ne parle pas des trucs évidents comme les guerres, Bush... C'est facile, ça. Tout le monde sait que c'est est un abruti entouré d'un gouvernement corrompu. Non vraiment... Je parle de sécurité sociale, des pauvres dont on ne s'occupe pas, le choix d'investir de l'argent dans des conneries à la place de s'occuper des gens. La chose la plus triste c'est que si le gouvernement change, je me demande ce qui va se passer. Je lisais dans les journaux que ça ne changerait pas vraiment. Les Etats-Unis s'effondrent aujourd'hui. Je veux dire de l'intérieur. Pour prendre un exemple personnel, c'est comme si j'étais accroc à l'héroïne sans jamais m'arrêter, je ne serais pas capable d'espérer que ça aille mieux un jour, j'en mourrais sûrement.



HHC: Tu veux dire même si les Démocrates sont élus?



P: Certaines choses changeraient sûrement, structurellement parlant, mais je ne vois vraiment pas qui que ce soit ayant les couilles de démobiliser les troupes en Irak. Je crois que c'est allé trop loin. Mais je prie pour que ça finisse un jour. Je me demande franchement si quelqu'un aura le courage de le faire, même s'il aura pu en parler avant l'élection... Je ne veux pas être négatif mais ce que je vois c'est un effondrement. Il y a ces lois qui ont été votées il y a quelques années impliquant Cuba et j'ai lu dans le Village Voice que même Hillary Clinton, une démocrate, va très certainement conserver cette loi. Il n'y aucun candidat contre ça. Je ne suis pas devin mais c'est vraiment déprimant, ce pays est supposé être l'un des meilleurs en ce qui concerne les questions sociales, un des pays offrant au moins des conditions de vie un peu meilleures. Alors comparer ça à l'Espagne? Mec! N'importe où sur Terre, même si le gouvernement est pourri, aux Etats-Unis c'est encore pire!



HHC: Tu as monté ton propre label, Eastern Developments grâce auquel tu as pu signer des artistes comme Daedelus, Eliot Lipp, Dabrye et A Cloud Mireya. Quelles étaient tes motivations?



P: C'est une sorte de label communautaire dans lequel sont impliqués les gens avec qui je traîne. Durant une soirée, nous avons décidé de créer un label de nos propres mains afin d'essayer de distribuer ces artistes, sortir leurs albums, le but n'était pas de se faire de l'argent mais juste essayer de les faire entendre et de les distribuer au plus grand nombre. Comme ils sont talentueux, ils nous ont donné des démos géniales qu'on écoutait dans nos chambres d'hotel. C'était le concept à la base en fait, mais les choses ont changé. Si tu choisis de te concentrer sur certains groupes, d'autres vont attendre plus de ta part... Certains sont du genre "Mec, combien d'argent tu me dois?", "T'as vendu seulement 400 exemplaires! J'ai même perdu de l'argent dans ton affaire..." Au début, c'était une manière d'aider des amis mais maintenant c'est plus difficile. Actuellement, je ne continue ça qu'avec des personnes qui me sont proches. Je suis un peu moins impliqué là-dedans en ce moment, parce que nous sommes tous plus ou moins occupé sur différents projets.



HHC: En parlant du projet A Cloud Mireya, est-ce que cette collaboration ne constituait pas une meilleure façon d'exprimer une certaine sensibilité qui ne collait pas avec que tu peux faire en tant que Prefuse73? Quel effet ça a fait de travailler avec la mère de ton enfant?



P: Hé bien, c'est la mère de mon enfant... donc c'est davantage du style nous nous réveillons le matin et décidons de composer une chanson. Nous n'étions pas concentrés sur la production, nous étions plus dans un état d'esprit "Allez, faisons de jolies chansons aujourd'hui", une pensée positive. C'est ce que c'est et ça va rester comme ça. Nous avons eu une mauvaise distribution à un moment donné, c'est pour ça que très peu de gens ont entendu de quoi il s'agissait. Mais c'est un album que je peux écouter pour l'analyser avec objectivité. Je pense que Claudia préférerait se concentrer davantage sur School Of Seven Bells à présent. Les morceaux que nous n'avons pas sorti referont probablement surface un jour ou l'autre. Comme ce vieux projet, Piano Overlord... C'est une bonne chose de l'avoir sorti. Et j'ai encore un tas d'albums qui ne sont pas sortirs. Un jour, peut-être...





HHC: Tu es parvenu à rassembler Ghostface Killah et EL-P sur 'Hideyaface'. C'est assez incroyable quand on connaît les différences de styles entre vous trois. Peux-tu nous parler de ce morceau? Comment as-tu rencontré Ghostface et comment l'as-tu convaincu de s'impliquer là-dedans? Est-ce que vous vous êtes tous rencontré pour de vrai ou est-ce resté de l'ordre du virtuel?



P: Ca a été plutôt simple... Simplement "Tu veux le faire ou non?". Ca paraît bien plus difficile au premier abord, mais ce sont tous les deux des gens ouverts d'esprit. J'avais déjà mes propres impressions sur eux étant donné qu'ils sont connus en tant qu'entités avant d'être vus en tant qu'être humains. Ils sont impliqués dans des choses différentes musicalement parlant, ils ne stagnent pas. Donc je me suis dis "Je vais les mettre sur le même morceau et je vais me charger du décor". Je voulais juste les entendre sur ce morceau, les voir apparaître là-dessus et voir ce qui pouvait se passer. C'était donc juste une idée, comme rassembler deux de mes MC's préférés sur un même morceau, provenant d'endroits différents, deux esprits différents mais très ouverts. Je n'ai pas fait ça dans le but de prouver quoi que ce soit mais juste pour essayer, tu vois? De mon point de vue, certaines choses marchent mieux que d'autres qui ne fonctionnent pas ; mais ça valait le coup de le faire.



HHC: Penses-tu que le public japonais comprend mieux que d'autres publics le sens de ton art? Etait-ce une des raisons qui t'a poussée à produire l'album de Twigy? Peux-tu nous dévoiler quelques détails concernant cet album et pourquoi l'as-tu choisi lui en particulier?



P: C'est lui qui m'a choisi. J'ai du apprendre à le connaître d'abord. Il a eu tellement de groupes... Il rappe depuis les années 80, j'étais impressionné. Puis j'ai réalisé qu'il avait été membre de Microphone Pager et j'avais un single d'eux qui date du début des années 90. Je me suis dis "Putain, c'est Twigy?". Peu après, il est venu chez moi, on a traîné ensemble puis on s'est décidé pour que je produise entièrement son album, il a donc choisi les morceaux qu'il appréciait. J'étais vraiment surpris par les premiers qu'il voulait utiliser, je disais "Okaaay... si tu le sens!". Il voulait juste faire quelque chose de différent. Tu sais, au Japon il était devenu une sorte de star et ça marche toujours bien pour lui mais c'est un mec fantastique et un très bon MC. Il était dans le crew de DJ Krush avant. Il est arrivé avec sa culture et certains aspects qui peuvent un peu te limiter parce que le japonais, de par sa phonétique notamment, est une des langues les plus difficiles à apprendre et à comprendre. Mais bon, si tu te sens bien avec la personne, ces choses là n'ont pas d'importance. Tu comprends vite si t'es dans le même état d'esprit ou non. Tu peux ressentir la même énergie, regarder l'autre et faire le truc. Donc c'était plutôt simple à faire, vraiment. Tu m'as posé une question à propos de mon art dans les pays étrangers et plus spécifiquement au Japon. Est-ce qu'ils acceptent davantage ce que je fais au Japon? Je ne sais, ce serait de la pure spéculation parce que géographiquement, je ne peux pas dire qui "gagne", je ne suis pas vraiment ça. J'essaie juste d'atteindre les gens quelque soit l'endroit où je me trouve. Tout se passe si tu le veux.



HHC: Est-ce que le prochain pas en avant serait un album de Prefuse entièrement produit pour un MC américain? Si c'est le cas, lequel choisirais-tu?



P: Nous projetions de produire un album avec Slick Rick. Ce serait le rêve. Je me demande s'il serait ok pour ça. Ou alors tout un album avec Nas, ce serait plus simple parce que je ne sais pas du tout comment dénicher Slick Rick. Il est plus vieux... Mais New York n'est pas une si grande ville après tout.



HHC: Que penses-tu des critiques autour de "Surrounded By Silence" et plus particulièrement sur ta soi-disante incapacité à produire des morceaux convenables pour les MC's?



P: En regardant ce que je faisais sur ce disque d'un point de vue conceptuel, ils n'ont simplement pas compris ma démarche. S'ils ont une opinion aussi tranchée...je veux dire...qu'ils aillent se faire foutre. J'adore lire ce genre de trucs, je ne sais pas pourquoi. C'est comme une partie de moi, j'aime les critiques ridicules. Voir jusqu'où les gens peuvent percevoir un disque. Tu réalises que ça demande beaucoup d'efforts pour eux d'expliquer la difficulté du travail réalisé, de trouver les mots pour dire combien j'ai été mauvais ou comment j'ai mal spéculé sur différentes choses. C'est le plus marrant. Comme s'ils te connaissaient personnellement. Le journalisme musical ressemble plus à du divertissement pour moi parfois. La manière dont ils écrivent ça n'est pas considéré comme quelque chose de sacré, du moins sous cet angle, c'est très ironique. Parfois, c'est comme un puzzle, comme un jeu.



Interview de Phara et Aaron
Retranscription de Aaron
Traduction de Newton et Cobalt
Juin 2008

Interview réalisée le 19 Octobre 2007 à La Cartonnerie, Reims.

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