Voici un DJ qui fait parler de lui depuis maintenant plus de 7 ans, principalement dans le milieu des compétitions, mais R-Ash a plus d'une corde à son arc: clubbing, radio, concert; il n'arrête pas. Beaucoup voient en lui l'un des meilleurs scratcheurs actuels. Comme dit le proverbe, il n'y a jamais de fumée sans feu donc nous nous sommes entretenus avec lui juste avant les DMC, qu'il vient de remporter avec son crew Scratch Science. Prochaine étape: Londres pour ce DJ qui n'a pas sa langue dans sa poche et un humour à toutes épreuves.

Hip-Hop Core: Présentation pour nos lecteurs? (palmarès, etc..)

R-Ash: J' ai commencé les platines en 1996, à l'âge de 11 ans. A ce jour, je suis trois fois champion de France scratch DMC, une fois champion de France scratch ITF, deux fois champion de Tunisie DMC. J'ai 21 ans...

HHC: Tu as commencé les compétitions très jeune; je me souviens de toi au DMC World en 2001. Comment juges-tu cette période avec le recul?

R: C'était beau. C'était une des première fois de ma vie que je partais seul aussi loin. Se retrouver en Angleterre pour faire les championnats du monde, c'est un rêve de gamin que tu réalises en étant gamin! J'en garde vraiment de très bons souvenirs...

HHC: Comment était la scène des DJ's à Toulon? Penses-tu que pour un DJ il est nécessaire d'être sur Paris pour pouvoir vivre de sa passion?

R: A Toulon, à l'époque, on devait être 4 ou 5 DJ's sur une population totale de 150 000 habitants, et sur ces 4 ou 5, je suis le seul qui ait vraiment poussé ça à fond. Aujourd'hui, tu peux en trouver un par km². De par mon expérience, je te dirais qu'il n'est pas nécessaire de vivre à Paris pour vivre de sa passion vu qu'il m'est arrivé de gagner 2000 euros par soirée dans des clubs toulonnais... Mais tout le monde sait que tout est centralisé à Paris et que d'ici tu as une force de frappe moins importante.

HHC: Tu as récemment remporté la coupe de France catégorie scratch. Ce qui frappe c'est cette attitude et cette aisance que tu as en compétition, un peu comme si tu scratchais dans ta chambre tranquillement. Tu le bosses ça ou c'est naturel?

R: Disons que c'est venu naturellement en le bossant. Je ne me suis jamais installé un miroir devant mes platines en me regardant et en voulant paraître détendu, mais j'ai fait énormément de scène alors on va dire que c'est surtout l'habitude. Quand t'as fait ça un peu toute ta vie et que t'as joué devant toutes sortes de public, il est rare que tu puisses encore te laisser envahir par le stress, comme quelqu'un qui a justement toujours fait ça dans sa chambre.

HHC: Tu ne penses pas aussi que le public des compétitions a changé aussi et qu'il est plus clément aujourd'hui?

R: Je ne sais pas, j'ai du mal à savoir... Mais le public des compétitions, c'est souvent les DJ's eux mêmes donc il reste à se demander ce qu'ils sont en mesure d'apprécier.

HHC: Comment as-tu préparé cette coupe de France, et quelles ont été tes motivations pour la faire?

R: Je voulais montrer que j'étais encore là malgré deux ans d'absence sur la scène des compétitions. Mais j'ai tout fait en improvisation, je ne l'ai pas préparé...

HHC: Tu as bien conscience que ce que tu dis là peut en énerver plus d'un. Pense à tous ceux qui ont bossé des routines durant des jours?

R: C'est possible.

HHC: Tu comptes faire des compétions à nouveau?

R: J'ai l'intention d'être plusieurs fois champion du monde dans les années à venir. Je suis vraiment content du fait d'avoir commencé super tôt, parce que ça me laisse une marge de manoeuvre de dingue. Je pense avoir encore quelques belles années devant moi, et avoir pris pas mal d'avance.

HHC: Cela signifie que l'on va te revoir à la rentrée sur le devant de la scène? Tu seras dans quelle catégorie? Comptes-tu représenter la Tunisie à nouveau?

R: Je serai dans la catégorie équipe représentant la France. La Tunisie, pourquoi pas? En attendant, je suis français donc bon...

HHC: On te connaît principalement comme scratcheur. Tu n'es pas intéressé par le beat juggling?

R: Si, j'adore. Quand je vois par exemple A-Trak qui est le meilleur pour moi dans ce domaine, je me dis vraiment que ça tue, mais malheureusement je n'ai jamais été assez patient pour ça. Le truc, c'est que si tu fais une erreur, ça gâche tout ton plan, et pour les moins expérimentés c'est souvent très cacophonique... Donc je préfère laisser ça à ceux qui le font bien.

HHC: Tu as ton show radio sur FG. Comment es-tu arrivé dans le monde de la radio? Comment définirais-tu ton émission?

R: En fait, j'avais déjà une émission de radio à Toulon de 1998 à 2003, donc j'étais déjà habitué à parler à l'antenne, d'où une certaine aisance au micro de FG. Je ne sais pas vraiment comment définir cette émission, parce qu'en réalité, c'est jamais la même. Une semaine, tu pourras avoir du crunk, l'autre du funk, l'autre du hip hop des 90's, l'autre de l'éléctro... Je pars du principe qu'on n'est pas obligé de s'enfermer dans un créneau précis.

HHC: C'est proche du son que tu passes en soirée?

R: Ca peut l'être, mais en soirée je joue 80% de musique électronique.

HHC: Justement en éléctro, quels sont les artistes que tu aimes jouer en ce moment?

R: Mstrkrft, les cliques Ed Banger, Kitsuné, Data... Enfin tu vois le genre...

HHC: En plus d'être un DJ de compétitions, de radio et de club, on te voit aussi collaborer avec des gens comme Puzzle ou encore Haroun. Tu peux nous parler de ces collaborations?

R: En fait, avec Haroun, on s'est connu il y a dix ans, plus exactement à l'époque de l'album de Fabe "Détournement De Son". La Scred passait régulièrement dans la région. Anecdote: lors d'un concert, ils faisaient monter le public sur scène et j'en ai profité pour aller voir Fabe et lui demander s'il y avait moyen de scratcher. Fabe va voir son DJ: "Hey, Pone, le petit a dit qu'il t'mettait à l'amende"... Bien sûr, tout le monde a halluciné de voir un petit de 12 ans même pas plus haut que les platines déchirer ça devant tout le monde. On est bien sûr tous resté en contact, surtout avec Mokless à l'époque qui nous avait fait quelques morceaux pour des mixtapes locales... à l'époque où ca se vendait encore en cassette. Avec le temps, chacun à fait un peu son chemin, et j'ai revu Haroun lors d'un concert de Puzzle. Lui même étant DJ, il m'a naturellement proposé de faire un track sur son album et de l'accompagner sur l'ensemble de ses scènes.

Avec Puzzle, ça s'est fait à la base par l'intermédiaire de DJ Logilo pour qui j'avais en 2003 fait un track sur sa compile "Hypercut". Quand je suis venu habiter sur Paris en 2005, Puzzle faisait son come-back en présentant l'ensemble du nouvel album (sorti fin 2006) en avant première au Nouveau Casino, Logilo m'avait programmé en première partie et depuis pareil, le feeling est super bien passé avec tout le monde, et lorsque Logilo est parti habiter à Toulouse, Puzzle ont fait appel à moi pour les suivre sur leurs scènes.

HHC: Comment as-tu travaillé le 'Scratch Fury' sur le solo d'Haroun?

R: On l'a fait en une nuit: instru + scratches + glitch. Ce morceau est réussi, personne n'avait fait quelque chose de similaire poussé à ce point. Il baise!

HHC: Parmi tous ces styles musicaux (rap, éléctro, scratch music) avec lequel tu te sens plus en adéquation?

R: En toute franchise, avec les trois. Mais je dois avouer, pour ma part, qu'en soirée bien alcoolisée, je préfère écouter de l'éléctro.

HHC: Cela te permet aussi de voir différents publics. Quel est celui qui est le plus réceptif à ton travail?

R: Tous, du moment que tu sais un minimum t'adapter pour retenir leur attention.

HHC: Peux-tu nous parler de ta prochaine sortie sur le label Scratch Science?

R: Et bien là, à vrai dire, on prépare les championnats du monde pour Octobre 2007, donc pour l'instant on ne s'est pas trop penché sur le futur break beat. Mais ça se voudra être quelque chose de très pratique et utile pour les DJ's, non pas un break parmi tant d'autres que tu sortirais au hasard pour scratcher, mais ce sera dans la lignée de ce qu'on a toujours fait avec Scratch Science. Ca sortira sous le nom de "VAND-VAND" (R-ASH + Silent).

HHC: D'ailleurs à ce sujet, quels sont les breaks que tu utilises le plus en ce moment?

R: En fait, je ne scratche pratiquement jamais, donc j'utilise aucun break beat, mis à part le "Grasshoper Pocket" de DJ Hertz.

HHC: Tu travailles avec Mixvibes. Quels sont les atouts de cet outil comparé à ses concurrents tel que Serato?

R: Et bien le fait que Mixvibes reconnaîsse tous les formats et qu'en un an d'utilisation, il ne m'a jamais planté entre les mains, chose que je pouvais reprocher à Serato à l'époque où je l'utilisais... Et puis l'équipe Mixvibes est vraiment super sympa, à l'écoute si jamais t'as un souci...

HHC: Sur quel matos travailles-tu sinon?

R: Platines MK2 et Numark. Et en table, j'aime bien les tables UMX de Gemini même si je préfère les tables Rane.

HHC: J'ai entendu récemment une rumeur te concernant qui disait que tu n'avais pas de platines chez toi, c'est vrai?

R: Ca l'a été pendant un temps mais ca s'est très vite arrangé.

HHC: Tu continues d'acheter des 33 tours?

R: Non.

HHC: Quels sont les lieux où tu t'approvisionnes?

R: Aucun.

HHC: Tu télécharges donc tous tes sons?

R: Non, je les achète sur Internet (rires).

HHC: Niveau scratch, quels sont les DJ's, voire les musiciens, qui t'inspirent?

R: Je n'en ai pas un en particulier. On va dire que tous les DJ's peuvent être amenés à m'inspirer quel que soit leur niveau. Il y a toujours quelque chose que tu ne fais pas et que l'autre fait. Sinon moins je scratche, mieux je scratche. C'est paradoxal mais c'est si vrai.

HHC: Si on te demandait d'affronter un DJ, tu choisirais lequel?

R: Je pense qu'une revanche contre l'américain Snake Eyez qui m'avait battu au championnat du monde (battle suppremacy 2001) pourrait être marrante en freestyle scratch... et sans lentilles, drapeau américain en guise de bandana et autres artifices du genre pour impressionner la galerie alors qu'on fait de la merde.

HHC: J'ai jamais compris le buzz qui existait autour de ce DJ à l'époque et il est clair que ce premier tour face à toi a été une belle escroquerie!

R: C'est pas faux. En même temps, le championnat se déroulait deux jours après la chute du World Trade Center. T'imagines si en plus de ça, c'est la Tunisie qui avait battue les États-Unis aux DMC...

HHC: Tu as co-animé l'émission "Très Fresh". Comment juges-tu la scène scratch française?

R: Je pense que c'est une des scènes les plus actives au monde. Les gens se bougent, se réunissent, cherchent encore à faire partager ce kif par l'intermédiaire d'émissions télé entièrement dédiées au scratch (chose qui n'a jamais été faite ailleurs qu'ici), de compétitions, de forums, etc... Tout le monde dit que c'est mort mais dans le fond, ca n'a jamais autant bougé. C'est mort pour ceux qui espèrent faire de la thune sur ca, mais le mouvement est plus présent que jamais.

HHC: Pour nos lecteurs qui aimeraient se procurer un de tes mixs, comment doivent-ils procéder?

R: Je n'ai pas de podcast et je mets rarement mes mixs en ligne donc ils devront attendre que l'on sorte notre "VAND-VAND/Lazer Disk" Volume 2 dans les bacs d'ici quelques semaines.

HHC: Y-a-t'il une question que je ne t'ai pas posée et à laquelle tu meurs d'envie de répondre?

R: Et bien, j'aurai bien aimé que tu me demandes ce que je peux penser des gens en général... et de la façon dont ils font tourner cette planète...

HHC: Justement qu'est-ce que tu penses des gens en général et de la façon dont ils font tourner le monde?

R: Que la vie c'est juste trop Fun et que les gens sont trop chan-més. Mais ce que je kiffe trop pas, c'est le gens qui disent que le monde part en couille.

HHC: Un message particulier à adresser aux lecteurs d'Hip-Hop Core?

R: Soyez bons autour de vous. Ne faites pas aux autres ce que vous ne voulez pas que l'on vous fasse. Et continuez à nous supporter, on vous le rendra en triple.

Interview de Bachir
Septembre 2007

http://www.myspace.com/rashdj

PS: Merci à Wilfrid de Baise pour les photos.