Planet Asia
Still In Training

Dès que le flow de Planet Asia a atteint les oreilles du public rap par le biais de sa prestation aux côtés de Rasco sur "Times Waits For No Man", tout le monde s'est empressé d'annoncer Planet Asia comme la prochaine star du rap californien. Armé d'un débit inné à forte teneur en explosifs et d'un vrai sens de la rime, il faut dire que l'ancien protégé de Fanatik avait de quoi faire jaser. Pourtant, plus de 4 ans après, l'intéressé peine toujours à prendre son envol (surtout au niveau des textes) et à confirmer les prédictions. Si son Ep "The Last Stand" a entretenu nos espoirs, son album commun avec Rasco sous le blase des Cali Agents était bien trop palichon pour avoir les effets escomptés. C'est même son associé du Skhool Yard, Kubiq, qui a le plus fait parler avec son brillant "Kuboniqs" ! Signé depuis 2 ans chez Interscope sans que le moindre son ait atteint nos bacs et alors que son Lp est constamment repoussé, Planet Asia a semble-t-il décidé de prendre enfin le taureau par les cornes et de faire bouger les choses. Il y eut d'abord l'album du collectif Skhool Yard chez Threshold et voici enfin en autoproduction un album de son cru : "Still In Training".

Composé uniquement d'inédits enregistrés ces dernières années, ce Lp 15 titres nous permet enfin de juger de l'évolution du Cali Agent #2 et de le retrouver en solo derrière le micro pour 53 minutes. Dès les premières mesures de 'Rock The Mic', une basse épaisse nous enveloppe et une guitare passée à travers quelques filtres sert de support idéal au flow instinctif de Planet Asia. Avec cet egotrip simple mais efficace, le emcee nous rassure en nous inondant de bonnes vibes (merci 427, rebaptisé Walt Liquor, pour la production). Alors lorsque le piano martial de 'Charcoal' retentit et qu'Asia commence à baffer les jaloux sans pitié, on est définitivement conquis… mais on se demande s'il ne s'apprête pas à retomber dans les impasses de "How The West Was One" en restant coincé en battle mode sur des beats majoritairement rentre-dedans. Planet Asia parvient dans un sens à éviter cet écueil. En effet, il nous livre enfin quelques textes à thèmes. Rien de profondément bouleversant mais au moins Jason a fait un effort. Comme sur ce 'Keep Movin'' au contenu politisant (!) où il s'insurge contre l'esclavage mental qui paralyse la communauté noire américaine sur un nid de violons intelligemment mis en sourdine. 'Fresno State of Mind' le voit donner sa version californienne du classique de Nas en dépeignant le côté sombre de sa ville entre violence, pression policière, stress et drive-by's aidé au passage par les cuts cinglants de l'ex-X-Ecutioners Mista Sinista. Ailleurs, pour ne pas trop déstabiliser son public de base, Planet Asia reste cependant dans son registre habituel en enchaînant les métaphores et les punchlines pour mieux se mettre en valeur. Il garde son côté paresseux dans l'écriture de ses refrains mais son phrasé de surdoué fait plus que passer la pilule. Privilégiant souvent l'énergie et les vibrations au contenu ('Keep Ya Ass Shakin'', 'I Spit Flows'), il nous fait passer quelques très bons moments lorsque les intrumentaux sont à la fête.

Il faut dire que, de ce côté, le casting contient quelques noms assez prestigieux. Madlib livre avec 'Breakin' Shit Down' une composition tout en déséquilibres avec le "minimalisme complexe" qui le caractérise (notes de piano et de basse distillées au compte-gouttes). DJ Khalil infuse 'M-16 Ammunition' de son empreinte sonore… Les fans de Self Scientific ne seront pas déçus. Walt Liquor (producteur exécutif) contribue au projet avec quelques compositions mémorables (le jazz feutré de 'Good Music', le groove subtil de 'Rock Tha Mic'…). Toujours soutenus par des basses lourdes, les rythmes et les instruments utilisés sont suffisamment variés pour que l'on se prenne au jeu. Malheureusement, tout n'est pas complètement blindé et quelques productions de seconds couteaux viennent dévaluer le cours de "Still In Training" dans sa deuxième moitié. A commencer par un 'Doin' What We Do' mainstream trempé dans la guimauve et resservi de plus sous la forme d'un remix inutile. Dans cette gamme, on pense aussi au ragga de bas étage de 'Mi Nuh Lef It' ou à l'instru squelettique (basse+batterie) et au mixage douteux d'un 'On The Block For Ya' qui voit pourtant Kubiq croiser le fer avec notre hôte. Si ces déceptions sont en nombre réduit, on ne peut s'empêcher de les regretter.

Néanmoins, compte tenu du fait qu'il est issu d'un collage de morceaux tirés de périodes très diverses et qu'il n'a donc pas la cohérence d'un vrai LP, "Still In Training" reste un album (officieux) de qualité. Jouant avec des formules connues sans tomber dans la caricature, il contient bien quelques titres "fast-forward" mais aussi un bon nombre de réussites totales qui devraient tourner longtemps sur les platines des puristes. Variant les ambiances et les sujets, globalement bien produit, il constitue un casse-croûte consistant pour les adeptes du rapper californien dans l'attente du premier album officiel d'un Planet Asia qui s'est plié à un entraînement exigeant.

Cobalt
Janvier 2003
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Label: Liquor Barrel
Production: Walt Liquor (427), Madlib, DJ Khalil, Jake One, Roddy Rod & Erik Rico
Année: Décembre 2002

01. Intro
02. Rock Tha Mic [Scratches by Walt Liquor]
03. Charcoal [Scratches by DJ Revolution]
04. Breakin' Shit Down
05. Fresno State of Mind [Scratches by Mista Sinista]
06. Keep Movin'
07. Keep Ya Ass Shakin'
08. Good Music
09. M-16 Ammunition
10. On Tha Block For Ya (feat. Kubiq)
11. Mi Nuh Lef It (feat. Madd Dogg)
12. I Spit Flows
13. Doin' What We Do
14. Outro
15. Doin' What We Do [Remix] (feat. Erik Rico)

Best Cuts: 'Rock Tha Mic', 'Good Music', 'Keep Movin''

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