Depuis deux ans qu'on attendait la sortie de "The Giancana Story", on avait fini par ne plus y croire et on s'était résolu à voir cet album disparaître dans les caveaux de Rawkus comme tant d'autres (Sir Menelik, Shabaam Sahdeeq...). Mais Kool G Rap en a décidé autrement. Prenant les choses en main, il s'est arrangé avec Koch pour faire enfin distribuer son sixième album officiel. Quelle mauvaise idée! La seule chose que ce nouvel LP peut faire c'est ternir la légende de l'ex-membre du Juice Crew. Car, si "Roots Of Evil" était déjà une semi-déception, "The Giancana Story" est cent fois pire.

Très loin des standards du parrain du gangsta rap, il se perd dans la médiocrité et la facilité. Prisonnier des clichés d'un thug rap auquel il a donné ses plus beaux moments, G Rap peine à se renouveler et ne nous livre plus aucun de ces textes haletants à l'écriture cinématographique ('On The Run') qui faisaient de lui le Kool Genius of Rap. Dépouillé de ses meilleurs atouts, il enchaîne les punchlines et les lieux communs et sonne désespérément banal. Après dix ans de bons et loyaux services, il semble avoir rongé son os jusqu'à la moelle... Les histoires de gangster de haut vol se succèdent et se ressemblent. Tout, sans exception, sent le déjà vu. A la limite, on aurait presque envie de sauver 'Black Widow' où G Rap nous conte l'histoire d'une femme gangster intraitable mais son refrain nous en empêche. Même ses disciples n'arrivent pas à lui insuffler une once de créativité. Seul Prodigy parvient à le redynamiser un tantinet à travers le patchwork d'images du ghetto mélancoliques de 'Where You At'... mais c'est tout.

Malgré tout, on aurait pu penser qu'avec son casting de têtes d'affiches "The Giancana Story" aurait pu s'en sortir. Mais non... car les productions sont bien trop propres, synthétiques et artificielles pour nous emmener à un quelconque moment dans la moiteur du Queens. Ça sent le gros studio et pas le béton! C'est surtout plat ('Good Die Young', 'The Streets') voire pitoyable à l'image du clavecin en carton de 'Drama' ou des violons Bontempi de 'Holla Back'. Et quand les productions sont un peu plus travaillées, il y de forts relents de redite... Ainsi le vocoder agaçant de 'My Life' tente sans ambiguïté de faire dans le sous-California Love. Buckwild et les Ghetto Pros sont à mille lieux de leurs jours de gloire (avec le D.I.T.C. et Screwball respectivement) et les nouvelles recrues sont à oublier rapidement. Bref, le niveau de la production est inadmissible... Et, en plus, force est de constater que Kool G Rap n'est plus qu'un suiveur qui se rabaisse même à une tentative bounce ridicule sur 'Fight Club' comme tant d'autres l'ont fait avant lui (Nas en tête) au lieu d'être l'inspirateur d'autrefois. Tout semble calculé, forcé et lamentablement quelconque.

Le remix de 'First Nigga' par DJ Premier disponible en promo depuis un an aurait considérablement relevé le niveau moyen mais il n'est même pas dans le tracklisting final. Décevant de bout en bout, "The Giancana Story" est sans conteste le plus mauvais album d'un Kool G Rap fatigué. Passez votre chemin sans vous retourner et réécoutez plutôt "The Roads To The Riches" "ou "Wanted : Dead Or Alive".

Cobalt
Décembre 2002