Prevail et Madchild ne sont plus seuls depuis quelques temps. En effet, leurs amis de longue date Moka Only et Rob The Viking les ont rejoints au sein de l'entité Swollen Members. Cette nouvelle configuration a poussé le groupe à repartir de zéro... Mais, depuis "Bad Dreams", l'ex-duo n'était pas resté les bras croisés. Il lui restait donc quelques nouveaux titres en stock qui n'auraient sûrement pas pu trouver leur place sur le LP des S&M nouvelle formule. Battle Axe a donc eu l'idée de compiler ces inédits à quelques "raretés" et faces B mais aussi à de tous nouveaux titres pour clore un chapitre de son histoire et nous donner à entendre ce que le futur nous réserve.

Au chapitre des morceaux "rares" mais déjà connus par les fidèles du groupe, on retrouve des extraits de qualité des compilations "Lyrics Of Fury" et "Battle Axe Warriors" dont les remarquablement agressifs 'New Details' et 'Battle Axe Exclusive'. On retrouve aussi le sublime 'English Breakfast' avec un DJ Vadim qui se surpasse avec un instrumental très sombre et menaçant. Quelques contributions très brutes de Zodak nous permettent de retrouver la magie de "Balance" ('Zenith'). Un Evidence retrouvé à la production sature de détails sonores le superbe 'Heavy Thinkers'. A noter enfin les 2 interventions de Joey Chavez aux manettes. Ses productions subtilement relaxantes ont toujours apporté un peu d'air frais dans l'univers rageur des Canadiens et là on ne déroge pas à la tradition. On a d'ailleurs du mal à départager 'Members Only' et 'Temptation' mais c'est ce dernier qui remporte nos faveurs pour l'évocation que Madchild et Prevail y font des tentations du quotidien qui nous obsédent. Pas besoin de s'attarder en fait, il suffit de dire que presque toutes les chutes de studio issues de la faste période 1998-2001 sont de facture classique mais valent le détour pour ceux qui ne les connaissent pas. Sur des formats souvent courts, elles sont régulièrement ornées des indispensables manipulations vyniliques de maîtres en la manière (DJ Revolution en particulier) et montrent surtout la complimentarité exemplaire des voix de Prev One et Madchild à cette époque. Les flows s'alliaient, s'équilibraient, coulaient de source et captivaient sans que le duo ait à forcément rentrer dans des concepts complexes.

Cependant, on ne peut pas dire que les titres récents soient aussi réussis. Loin de là! A l'image d'un 'Steppin Thru' inécoutable, le groupe semble malheureusement avoir pris une approche dancefloor bien plus commerciale depuis l'arrivée de Moka... Au lieu d'apporter comme on l'espérait de la chaleur et de l'authenticité au groupe, son intégration semble avoir brouillé les cartes. Sur des productions fades, ses capacités de chanteur sont en effet utilisés sur chaque refrain et ce systématisme dans la facilité a le don de nous énerver au plus haut point. Faisant la part belle aux synthés bourrins, les nouveaux morceaux cafouillent à tous les niveaux ('Red Dragon'). La qualité douteuse des productions n'est même pas rattrapée par les textes vu que la plupart du temps aucun thème particulier n'est abordé et que les emcees se contentent de dérouler leurs rimes sans se mettre aucune barrière. Seuls les vibrants 'Act On It' (une chute de "Bad Dreams") et 'Long Way Down' redressent un peu la barre grâce à de bonnes prestations de Rob The Viking derrière la MPC et dénotent d'un léger effort d'écriture en évoquant avec honnêteté la mort et les méandres de l'amour respectivement. A côté de ça, même les invités sonnent hors sujet. Pourtant amie de longue date des Swollen Members, Nelly Furtado ne semble pas à sa place sur 'Breath'. Et Saukrates, qui a vraisemblablement passé trop de temps aux côtés de Redman, produit un remix indigeste de 'Fuel Injected' à des années lumière du charme de ses légendaires "The Underground Tapes". En résumé, sur les nouveaux titres, c'est plutôt la débandade et on espère que le groupe se rattrapera à temps pour son vrai troisième album...

Loin d'être indispensable, "Monsters In The Closet" est hautement hétérogène et mitigé. Il contient quelques titres excellents mais rarement inédits, ce qui décevra probablement ceux qui suivent le groupe depuis "Balance". Si ces tares sont en grande partie imputables à la nature même du projet, il peine à trouver une justification et ne trouvera de sens qu'auprès de ceux qui n'ont jamais été au-delà de la discographie officielle de Madchild et Prevail. "Monsters In The Closet" fera peut-être le bonheur de ces quelques b-boys mais les autres resteront sur leur faim. Les Swollen Members auraient sûrement été plus avisés d'attendre d'avoir un vrai nouvel album sous le bras pour réapparaître dans les bacs.

Cobalt
Janvier 2003