Suite au départ de Jay Dee des rangs de Slum Village, on était plus que sceptiques envers les perspectives futures de Baatin et T3. Car on peut affirmer sans être mauvaise langue que c'est bien sur le talent du prodige de Detroit que reposait entièrement le succès de "Fantastic Vol. II" ou "Best Kept Secret".

La sortie de "Dirty District" est donc l'occasion de faire le point sur l'état de santé de SV et sur la façon dont ils surmontent la défection de leur star en attendant "Trinity". Mais, ne vous méprenez pas, cet opus n'est pas le nouvel album de SV mais bien un mix des travaux récents de leur famille étendue. C'est plus une porte ouverte sur les talents qui envahissent les rues de Detroit et des USA. On trouve même un morceau réchauffé de 3582 et un de Twin (Infamous Mobb)! Baatin et T3 sont au rendez-vous mais on retrouve leur nouveau partenaire Elzhi et leurs amis Mu et Phat Kat de manière tout aussi proéminente... Et on ne s'en plaindra pas! Si on a pu reprocher à SV leur léthargie au micro et leurs rimes sans imagination, on ne peut pas en dire de même de leurs compagnons qui avec des textes classiques et street parviennent à aligner les bonnes phases et à se mettre en avant. Du coup même les maîtres de maison ont amélioré leurs textes pour marquer le coup ('Intro', 'One'). Ça ne fait pas dans la philosophie, ça ne révolutionne pas le genre mais en tout cas les phrasés sont variés et les punchlines font leur effet.

Young RJ et T3 se sont occupés d'une majorité écrasante de la production pour pallier l'absence de J-Dilla. Le résultat est très minimaliste (rarement plus qu'un beat assaisonné de quelques percussions et de notes de synthé rythmiques) et se démarque vraiment de la concurrence, parvenant à nous séduire à l'occasion. C'est du solide mais en même temps rien de fantastique ou de réellement enthousiasmant. Certains instrumentaux auraient même mérité de rester au placard ('Shut Shit Down', 'Heat'). Globalement, les sons claquent mais l'uniformité des textures est le principal reproche que l'on pourra faire... Seules les interventions de Karriem Riggins ou Wajeed amènent sur la longueur une vraie fraîcheur à l'ensemble avec une plus grande richesse dans la composition ('VIP In', 'Real Life', 'Freestyle').

Au bilan, on peut dire que Baatin, T3 et Elzhi prouvent qu'ils ont des ressources et les moyens de se passer de Jay Dee... mais qu'ils ont du mal à égaler sa versatilité. Ce projet annexe satisfera à coup sûr les amoureux de SV qui veulent mieux connaître les racines du groupe et de son crew mais les autres seront probablement mieux avisés d'attendre la sortie de "Trinity" pour entendre un produit plus abouti de la nouvelle mouture de Slum Village. "Dirty District" est un album de crew sympathique mais qui possède les défauts inhérents à ce type de Lp. A vous de voir maintenant... En tout cas, le trio est bien vivant!

Cobalt
Juillet 2002