Producteur historique du label Son Records, beatmaker majeur de la scène britannique et accessoirement b-boy de la première heure, Style Cee revient aux affaires avec un tout nouveau maxi. De quoi remettre un peu d'ordre dans la maison après un album de Pitman affligeant, qui aura garni le compte en banque du label mais aussi sérieusement endommagé sa réputation de gage de qualité (les meilleures blagues sont de courte durée). Un an tout rond après la sortie de 'Joyrider', l'ancien membre de Lost Island vient donc déposer dans les bacs un 12" inédit entièrement mis en musique par ses soins pour nous remettre en confiance.

Sur la face A, Styly convie un habitué de la maison. C'est en effet le emcee de Norwich DPF, déjà vu à la fête avec son "Mental Floss EP", qui vient faire étalage de son talent évident le temps d'une prestation survitaminée. Pluie de scratches en ouverture, samples étouffées, basse généreuse, déluge de rimes multi-syllabique quasi-ininterrompu: 'Once & For All' entame bien les choses. Pas mal. Mais l'important n'est pas là. Car c'est sans conteste possible la face B qui justifie à elle seule l'acquisition de ce maxi. Confirmant son immense potentiel et la vitalité de la scène underground de Nottingham, Scorzayzee y raconte avec beaucoup de justesse les destins croisés et les espoirs déçus de toute une génération à travers trois portaits, comme autant de vignettes du quotidien cruellement vraies. "The poor want what the rich got, the rich want more / Like a street sweeper standin' in the shut door / Staring into earth & spacies / While the world walks past him". Pour entourer ce triptyque à l'émotion palpable, Styly lui a serti un écrin au diapason. Envoûtant, 'Want What's Yours' prend les contours d'un boom-bap raffiné à base de piano mélancolique, de sample vocal déchirant, de scratches bien dosés et d'une batterie rugueuse comme le bitûme. En un mot comme en cent, un des titres les plus convaincants du genre depuis des lustres. Du coup, même si Styly Cee est un vieux de la vieille au classicisme revendiqué et qu'il ne propose rien de fondamentalement nouveau, ce maxi rondement mené mérite plus qu'une rotation sur votre platine. Décidément, Son Records a plus d'une corde à son arc…

Cobalt
Mars 2004