Toujours avide de rencontres et de changement, Kool Keith part de là où les Analog Brothers s'étaient arrêtés pour s'unir à H-Bomb et Marc Live au sein de la nouvelle formation KHM et tenter de faire oublier la débandade de son récent "Spankmaster".
Pour ceux qui se demandent qui sont les deux impudents qui osent s'acoquiner avec la légende, petite revue d'effectif. H-Bomb est mieux connu sous le nom de Jacky Jasper pour ses méfaits commis aux côtés de Keith période "Dr Doom". Marc Live est lui une des éminences grises des précités Analog Brothers : le responsable des productions synthétiques envoûtantes de "Pimp To Eat". Ici, il délaisse le côté digital funk pour adopter une touche plus expérimentale mais toujours aussi nourrie des avancées technologiques de Korg. Ce côté artificiel pourra, c'est clair, en rebuter certains et devient vite assommant ici. Surtout que les réussites sont diverses comme chez tous les adeptes du "no sample". Pour un sublime 'U Jerk Chickens' combien de titres horriblement dénués de personnalité à la 'Gotta Do'! Tout ça pour confirmer que le bon vieux sampler reste encore la meilleure solution de faire un bon album...
Dans les textes, KHM s'inscrit sans sourciller dans la continuité des dernières sorties de Keith. Entre quelques regards acides sur l'industrie rap et des egotrips bien mythomanes ('Nice Things', 'Xecutive Decision'), le trio attaque de front Outkast et en particulier Andre ('Copy What U Want') que Keith accuse, non sans raisons, d'avoir plagié son style extravagant. Mais force est de reconnaître qu'à force de se complaire dans une critique facile du milieu rap, Keith passe pour un vieillard aigri, ne se renouvelle plus et a perdu une grande part du génie créatif et de la folie qui ont donné naissance à un classique tel que "Dr. Octagon". Reste un flow unique et quelques métaphores bien senties mais aussi des collaborateurs plus frais pour attirer l'attention encore et toujours sur un album tel que "Game". H-Bomb reste en retrait, s'inscrivant trop dans les pas de Keith pour marquer de son sceau ce projet, mais Marc Live fait contrepoids avec un côté street plus direct qui s'accommode mieux de l'ambiance sonore du tout. Il est au final celui qui tire le mieux son épingle du jeu.
"Game" est au demeurant assez solide (clairement supérieur aux fatiguants "Matthew" et "Spankmaster") et possède de bons moments mais déçoit forcément et ne parvient pas à changer la donne... A quand un nouveau souffle pour l'ex-Ultramagnetic MC en perte de vitesse?
Cobalt Septembre 2002